Agent sportif ou Avocat mandataire sportif ? Deux activités à différencier ...En effet, l'essence même de l'activité d'agent sportif est de "mettre en rapport" les parties intéressées (joueur, entraîneur, club, organisations sportives) à la conclusion d'un contrat relatif à l'exercice rémunéré d'une activité sportive. Celle de l'avocat est de défendre les intérêts de son client. En qualité de mandataire sportif par définition, il assiste, représente et négocie au nom d'une des parties intéressées à la conclusion d'un tel contrat.
L'agent sportif - Définition
La Loi Française définit ainsi l'activité d'agent sportif :
Quant aux Règlements sportifs internationaux, la FIFA (Fédération Internationale de Football Association) qualifie d'agent de joueur la "personne physique dont l’activité consiste, conformément aux dispositions suivantes, à mettre en rapport contre rémunération, un joueur et un club en vue de la conclusion ou de la reconduction d’un contrat de travail ou deux clubs en vue de la conclusion d’un contrat de transfert"
(Règlement Agents de Joueurs Fifa, version 2008)
Pour la FIBA (Fédération Internationale de Basketball), un agent de joueur est "une personne dont les démarches (rémunérées) permettent la réalisation d’un transfert international de joueurs ou d'entraîneurs ou y contribuent"
(Règlements Internes Fiba, Livre 1, Dispositions Générales)
En d'autres termes ... sera qualifié d'agent sportif celui qui en exerce l'activité, laquelle consiste à mettre en rapport, contre rémunération, plusieurs parties entre elles (joueur, entraîneur, clubs, organisations sportives) en vue de l'exercice rémunéré par un sportif ou un entraîneur d'une activité sportive.
Pour exercer cette activité, même occasionnellement, l'agent doit impérativement être détenteur d'une licence d'agent sportif délivrée par la Fédération de la discipline concernée.
Et l'avocat
De fait, il est généralement admis que l'avocat, dans le cadre de l'exercice de sa profession, est habilité à représenter et négocier au nom et pour le compte de ses clients sportifs, et ce sans être tenu de devoir être détenteur d'une licence d'agent sportif.
Ainsi, la Fifa indique expressément : "un avocat légalement habilité à exercer conformément aux règles en vigueur dans son pays de résidence peut représenter un joueur ou un club lors de la négociation d’un transfert ou d’un contrat de travail." (art. 4 du Règlement Agents Sportifs Fifa, version 2008).
Pour autant, la profession d'avocat est-elle compatible avec l'exercice de l'activité d'agent sportif ?
En 2009, l'Ordre des Avocats au Barreau de Paris (ne concernant donc que les avocats parisiens) a adopté la disposition suivante :
Créé par décision du Conseil de l'Ordre en date du 17 mars 2009 (Bull Barreau de Paris, 20 mars 2009, n°10) ; Modifié par décision du Conseil du 6 juillet 2009 (Bull. Barreau de Paris, 17 juillet 2009, n°25)
Mise A Jour 29 mai 2012
Selon Bulletin du Barreau de Paris du 29 mai 2012, il est indiqué que le Conseil de l'Ordre a voté la modification de l'article P. 6.2.0.3.
Le terme "agent sportif" a ainsi été remplacé par "avocat mandataire sportif", conformément à la Loi du 28 mars 2011.
Puis, aux termes de l'article 4 de la Loi n°2011-331 du 28 mars 2011, le législateur a adopté les dispositions suivantes :
« La méconnaissance par un avocat exerçant l'activité mentionnée au premier alinéa des obligations résultant pour lui du dernier alinéa des articles 10 et 66-5 de la présente loi ainsi que du deuxième alinéa de l'article L. 222-5 du code du sport est passible des peines prévues au premier alinéa de l'article L. 222-20 du même code. Le montant de l'amende peut être porté au-delà de 30 000 € jusqu'au double des sommes indûment perçues en violation du dernier alinéa de l'article 10 de la présente loi.
« Les infractions aux règles de rémunération mentionnées au premier alinéa de l'article L. 222-5 du code du sport sont punies d'une amende de 7 500 €. » ;
II. ― Après l'article L. 222-19 du code du sport, il est inséré un article L. 222-19-1 ainsi rédigé :
L'Avocat Mandataire Sportif - Définition
Lors des débats (séance du 8 décembre 2010) devant le Sénat de l'article 4 de la Loi du 28 mars 2011, M. Laurent Béteille, Rapporteur, a indiqué :
"(...) Le texte initial de la proposition de loi encadrant la profession d'agent sportif rendait incompatibles les activités d’avocat et d’agent sportif. Finalement, cette incompatibilité a été levée dans le texte définitif. Dès lors, il convenait de préciser les conditions dans lesquelles les avocats pourraient intervenir dans la conclusion des contrats relatifs à l’exercice rémunéré d’une activité sportive ou d’entraînement.
Le dispositif retenu permet à un avocat d’agir en tant que mandataire du sportif, de l’entraîneur ou du club, sans avoir à obtenir une licence d’agent sportif. En effet, on peut considérer que l’avocat possède des qualifications suffisantes pour exercer une telle activité, sans avoir à obtenir une licence, qui n’ajouterait rien. (...)"
"(...) L’exercice de cette activité par les avocats suppose qu’elle se fasse en qualité de mandataire et non comme agent sportif. En effet, le statut d’agent sportif, notamment l’obligation d’avoir une licence et d’être soumis à la discipline des fédérations sportives, est contraire aux princes essentiels de la profession d’avocat. (...) Le texte, tel qu’il ressort des travaux de la commission, aboutit à un système équilibré, qui laisse aux sportifs la possibilité de choix entre l’avocat mandataire et l’agent sportif. (...)".
Quelles Différences entre l'Agent Sportif et l'Avocat Mandataire de Sportif ?
La réponse ministérielle du 1er février 2011
A une question posée par Madame Maryse Joissains-Masini, Députée des Bouches du Rhônes, Monsieur le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et des Libertés, a précisé selon réponse ministérielle publiée au Journal Officiel du 1er février 2011 :
"L'article 1er bis du projet de loi de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et de certaines professions réglementées, dont l'objet est de permettre aux avocats d'exercer, en cette qualité, des activités similaires à celles réservées aux agents sportifs, a été introduit par la commission des Lois de l'Assemblée nationale. Il a été adopté par les députés en première lecture le 30 juin 2010 et par le Sénat le 8 décembre 2010. Les précisions qui figurent dans ce texte sont nécessaires. En effet, d'une part, s'il entre dans les attributions d'un avocat, de représenter, dans le cadre d'un mandat, les intérêts d'un sportif ou d'un club, l'activité consistant à mettre en rapport les parties intéressées à la conclusion d'un contrat relatif à l'exercice d'une activité sportive, qui caractérise l'activité d'agent sportif, constitue, en revanche, une activité de courtage, par nature commerciale et, de ce fait, interdite aux avocats. D'autre part, ces dispositions vont dans le sens de la moralisation du milieu sportif, objectif qui a guidé les travaux du Parlement lors de l'examen de la proposition de loi encadrant la profession d'agent sportif. Ainsi, c'est dans le but d'encadrer davantage les conditions dans lesquelles sont conclus les contrats portant sur l'exercice rémunéré d'une activité sportive que le choix a été fait de soumettre les avocats aux mêmes obligations que celles imposées aux agents sportifs, à l'exception de la détention d'une licence. Le dispositif, tel qu'adopté par le Sénat, est parfaitement équilibré en ce qu'il conserve les principes qui s'attachent à la profession d'avocat tout en garantissant la moralisation du sport par la soumission des avocats à la limitation de leur rémunération à 10 % du montant du contrat conclu avec le club et à l'obligation de transmission de tous les contrats aux fédérations sportives. Si la fédération détecte un abus, elle en informera le bâtonnier qui diligentera s'il y a lieu des poursuites disciplinaires. "
L'avocat ne fait pas de démarchage
Quant à l'opération de courtage, celle-ci "(...) part d'un contrat de courtage ayant pour partenaires un donneur d'ordres et un courtier, contrat auquel s'ajoute une relations courtier-tiers, l'ensemble devant permettre la réalisation du contrat de courtage, à savoir la conclusion d'un contrat entre le donneur d'ordres et son tiers (Ph. Devesa, L'opération de courtage, 1993, Litec, n°57). Le courtier est un simple intermédiaire qui se borne à mettre en rapport les parties qui ont recours à ses services. Il les laisse contracter directement si elles le désirent. Il n'intervient pas à l'acte. Il ne traite pas lui-même l'opération et il ne représente pas ses clients (Ph. le Tourneau, op. cit.). Quand le rapprochement a eu lieu, il s'efface (Cass. req. 16 juin 1902, S. 1903. 1. 38.)"
(Yves Rousseau, Répertoire de Droit du Travail, Ed° Dalloz, Agences d'emploi, Avril 2006, §149).
En somme, après l'opération d'entremise qui peut relever de l'agent sportif, la négociation et la conclusion du contrat peuvent relever de l'avocat, mandataire du sportif.
Enfin, indiquons que dans son Guide Pratique pour les Avocats Mandataires en transaction immobilière, le Conseil National des Barreaux précise que l'avocat peut avoir une activité d'intermédiation, sous réserve que celle-ci soit exercée à titre "accessoire" :
L'application de cette théorie suppose donc que l'intermédiation demeure l'accessoire à la relation, nécessairement plus globale, entre l'avocat et son client.
Enfin, le rôle de l'avocat n'est pas limité à celui de mandataire sportif
Alors que la loi française fixe l'activité d'agent sportif aux seuls contrats relatifs à l'exercice rémunéré d'une activité sportive, l'avocat n'est pas limité à son seul rôle de mandataire sportif définit par la Loi du 28 mars 2011.
En sa qualité d'avocat, ce dernier pourra donc également conseiller, assister et représenter ses clients sportifs en vue de la conclusion d'autres contrats que ceux relatifs à l'exercice rémunéré d'une activité sportive (contrat d'image, de sponsoring, ...) et les défendre devant toutes juridictions sportives, administratives et judiciaires, nationales et internationales.
Cependant, une fois la mise en relation effectuée, comment choisir entre agent sportif et avocat mandataire ?
Encore une fois, les débats parlementaires de la Loi du 28 mars 2011 permettent d'apporter quelques éléments de réflexion.