Conciliation CNOSF : analyse des principales modifications issues du décret n°2024-821

Scpa BERTRAND
18.07.24 01:23 - Commentaire(s)
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Le décret n°2024-821 du 15 juillet 2024 apporte des modifications substantielles à la procédure de conciliation devant le Comité national olympique et sportif français (CNOSF). Cette procédure (décrite dans cet article) constitue un préalable obligatoire avant tout recours contentieux pour la plupart des litiges sportifs. Les innovations du décret portent à la fois sur la composition de la Conférence des conciliateurs, sur certaines règles procédurales et sur la transparence de l'activité de la Conférence. Elles visent à renforcer l'efficacité, la souplesse et la lisibilité de ce mode de règlement des différends.

I. Évolution de la composition de la Conférence des conciliateurs

Le décret n°2024-821 du 15 juillet 2024 modifie substantiellement la composition de la Conférence des conciliateurs du CNOSF. L'article R. 141-10 du code du sport, dans sa nouvelle rédaction, prévoit que les conciliateurs sont désormais "au nombre de treize au moins et trente au plus", contre "treize membres au moins et vingt-et-un membres au plus" auparavant.              

Par ailleurs, une limite d'âge est instaurée, les conciliateurs devant être "âgés de soixante-quinze ans au plus à la date de leur nomination ou de leur renouvellement". Leur mandat, d'une durée de quatre ans, peut être prolongé "jusqu'au renouvellement des membres de la conférence, sans que cette prolongation ne puisse excéder six mois". 


Le texte précise les modalités de remplacement d'un conciliateur en cours de mandat : "En cas de décès, de démission en cours de mandat, ou d'empêchement, le mandat du conciliateur désigné en remplacement expirera au terme du mandat du conciliateur remplacé."

Autre innovation : la création d'un statut de conciliateur honoraire. Le décret prévoyant que "Le titre de conciliateur honoraire peut être conféré par le conseil d'administration du Comité national olympique et sportif français dans les conditions qu'il détermine." Cette mesure vise à valoriser l'expérience des conciliateurs ayant cessé leurs fonctions.
Enfin, le président et le vice-président de la Conférence sont désormais nommés "pour une durée de quatre ans" (article R. 141-12 modifié), et non plus "pour la durée de l'olympiade". Le vice-président a vocation à "suppléer [le président] en cas d'empêchement". Ces dispositions visent à assurer une plus grande stabilité dans le pilotage de la Conférence.

Modifications apportées par le décret 2024-821 du 15 juillet 2024

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II. Assouplissement des règles procédurales

Le décret comporte plusieurs mesures de nature à assouplir les règles procédurales de la conciliation. En premier lieu, il étend les possibilités pour le président de la Conférence de lever l'effet suspensif du recours. Alors que cette faculté était jusqu'à présent limitée aux cas de "violence caractérisée" (ancienne rédaction de l'article R. 141-6), elle pourra désormais être mise en œuvre "notamment dans les cas de violence et d'agression sexuelle", le mot "caractérisée" ayant été supprimé.              
Le texte consacre également la possibilité de tenir les audiences de conciliation par visioconférence. L'article R. 141-22 modifié dispose ainsi que le conciliateur "peut décider de tenir l'audience de conciliation en utilisant un moyen de visioconférence permettant de s'assurer de l'identité des parties et garantissant la qualité et la confidentialité des échanges." Cette faculté, expérimentée avec succès pendant la crise sanitaire, est ainsi pérennisée. En cas de visioconférence, "le procès-verbal devra être signé par un procédé fiable garantissant l'identité du signataire et l'intégrité du procès-verbal".

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Autre assouplissement notable : même lorsqu'il constate l'irrecevabilité de la demande de conciliation, le conciliateur pourra "inviter les parties à participer à une procédure de conciliation facultative, qui est mise en œuvre au cours de la même audience si les parties décident de s'y soumettre" (nouvel alinéa inséré à l'article R. 141-22). Cette innovation pragmatique permettra de favoriser la résolution amiable des différends, y compris lorsque les conditions de recevabilité ne sont pas réunies.              
Enfin, le décret apporte des précisions utiles sur les modalités de notification des actes de procédure. Le dernier alinéa de l'article R. 141-21 est ainsi réécrit pour prévoir que "Les notifications mentionnées au présent article sont adressées par tous moyens permettant de rapporter la preuve de la réception." Il ajoute par ailleurs aux cas d'irrecevabilité des demandes de conciliation l'hypothèse où la demande "est devenue sans objet" (4° ajouté à l'article R. 141-16).

III. Renforcement de la transparence de l'activité de la Conférence

Le décret comporte plusieurs dispositions visant à accroître la transparence de l'activité de la Conférence des conciliateurs. Un nouvel article R. 141-13-1 lui donne la possibilité de "rendre publique sa pratique décisionnelle dans le respect du secret des délibérations et de l'anonymat des parties". Cette faculté s'exerce "dans les conditions [que la Conférence] détermine".              
Dans les mêmes conditions, et "avec l'accord des parties", la Conférence pourra également "publier une brève analyse du litige et de la proposition de conciliation qui a été notifiée". Ces dispositions, qui s'inspirent des pratiques de certaines autorités administratives indépendantes, visent à renforcer la prévisibilité et la sécurité juridique pour les acteurs du sport, en leur permettant de mieux connaître la "jurisprudence" de la Conférence.
Le texte procède par ailleurs à diverses coordinations et ajustements rédactionnels. Il modifie ainsi l'article R. 141-8 pour préciser que la saisine du CNOSF "à fin" (et non plus "afin") de conciliation interrompt le délai de recours contentieux. Il supprime le premier alinéa de l'article R. 141-7, qui faisait doublon avec les dispositions de l'article R. 141-16 sur l'irrecevabilité des demandes. À l'article R. 141-13, la référence à "l'article R. 141-7" est remplacée par un renvoi plus large à "la présente section".

Ces différentes mesures entreront en vigueur le lendemain de la publication du décret, sous réserve de dispositions transitoires pour les nominations de conciliateurs en cours. Elles sont de nature à renforcer l'efficacité, la souplesse et la transparence de la procédure de conciliation devant le CNOSF, qui joue un rôle essentiel de régulation des litiges sportifs.

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En définitive, le décret n°2024-821 du 15 juillet 2024 opère une réforme d'ampleur de la procédure de conciliation devant le CNOSF. En augmentant le nombre de conciliateurs, en instaurant une limite d'âge et un honorariat, en assouplissant les règles procédurales et en renforçant la transparence, il vise à "accélérer la procédure et assurer le renouvellement effectif de la conférence des conciliateurs", comme le souligne la notice du décret. Ces évolutions sont de nature à renforcer l'efficacité et l'attractivité de ce mode alternatif de règlement des litiges, dans un contexte de judiciarisation croissante des conflits sportifs.

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La procédure de conciliation CNOSF

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Loi du 8 mars 2024 : un renforcement de la protection des pratiquants et de l'honorabilité dans le sport

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Scpa BERTRAND