Relégation administrative des Girondins de Bordeaux en National 1 par la DNCG

Cabinet Bertrand
22.07.22 16:47 Commentaire(s)
DNCG - rétrogradation - cabinet d'avocats en droit du sport à paris France

Le mercredi 6 juillet 2022, la Commission d’appel de la DNCG a confirmé la décision prise par la Commission de contrôle des clubs professionnels du 14 juin 2022. Cette décision a prononcé la rétrogradation administrative des Girondins de Bordeaux en National 1 au motif de difficultés financières. Cette sanction administrative vient donc se cumuler à la relégation sportive (en Ligue 2) du club à l’issue de la saison 2021-2022.
Face à cette situation en l'état défavorable, quelles sont les voies de recours que les Girondins de Bordeaux peuvent utiliser pour contester cette décision ?

La décision ayant été rendue par la Commission d’appel de la DNCG de la Fédération Française de Football (FFF), les voies de recours fédérales internes sont en l'état épuisées.

Dès lors, comment contester cette décision administrative de rétrogradation ? Quelle juridiction le club des Girondins de Bordeaux peut-il saisir ? Quel est le rôle du Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) dont le recours à la conciliation constitue un préalable obligatoire à tout recours contentieux ?

La conciliation préalable obligatoire devant la Conférence des conciliateurs du CNOSF

Préalable obligatoire à tout recours contentieux, le Club doit saisir la Conférence des conciliateurs du Comité national olympique et sportif français (CNOSF).

En effet, les décisions prises par la DNCG sont considérées comme des décisions prises par la Fédération Française de Football (FFF) dans l'exercice de ses prérogatives de puissance publique ou en application de ses statuts, au sens de l’article R.141-5 du Code du sport. Elles sont donc soumises, en application de cet article, au préalable de conciliation devant le CNOSF  (Conseil d’Etat, 2e et 7e chambre réunies, 22 juin 2017, n°398082), préalable obligatoire à tout recours contentieux.  

La demande de conciliation doit être effectuée dans un délai de quinze jours suivant la notification ou la publication de la décision contestée (R.141-15 Code du sport).  La saisine régulière du CNOSF interrompt le délai de recours contentieux (R.141-8 Code du sport).

Les mesures proposées par les conciliateurs seront "réputées acceptées par les parties et doivent être appliquées dès leur notification", sauf opposition par l'une ou l'autre des parties dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la proposition de conciliation formulée par le CNOSF (R.141-23 Code du sport). En cas d'opposition à la proposition, les parties disposent alors d'un délai de recours contentieux d’un mois pour saisir le Tribunal administratif (R.141-9-1 Code du sport).

Le Club des Girondins de Bordeaux a saisi la Conférence des conciliateurs du CNOSF.


D'abord convoqué le 19 juillet 2002, l'audience a été reportée au jeudi 21 juillet. 


Une proposition de conciliation va donc être rendue dans les prochains jours. 


(à suivre...) 


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Le recours contentieux devant le Tribunal administratif

Après avoir épuisé les voies de recours internes et respecté le préalable obligatoire de conciliation, le club peut saisir la juridiction administrative. 

Il peut saisir le Tribunal administratif (en l'espèce de Paris) d’un recours au fond (en annulation), mais aussi (sous réserve du dépôt d'une requête au fond) en référé-suspension afin de tenter d'obtenir la suspension des effets de la décision contestée de la DNCG (jusqu’à l'examen du recours au fond). 

Le recours en référé-suspension exige cependant que puisse être démontré d'une part, l'urgence à suspendre les effets de la décision contestée, et d'autre part, un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de ladite décision ( L.521-1 du Code de la justice administrative).

Le délai de recours contentieux applicable en l’espèce sera d’un mois à compter :
  • soit du rejet de la demande de conciliation par le Président de la Conférence des conciliateurs en application de l'article R. 141-16 du Code du sport,
  • soit de la notification par l'une ou l'autre des parties de son opposition aux mesures proposées par le conciliateur (R. 141-9 Code du sport).

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Les conséquences de la rétrogradation administrative du club des Girondins de Bordeaux

Si les différents recours énoncés n’aboutissent pas, le club des Girondins de Bordeaux pourrait faire l'objet d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire. Dans ce cas, en application de l’article 234 des Règlements généraux de la FFF, cela entraînerait "immédiatement" sa rétrogradation "au minimum" d'une division, soit en l'espèce en National 1 (le club étant déjà relégué sportivement en Ligue 2). Le club perdrait alors également par voie de conséquence son statut de club professionnel. 

A titre de comparaison, au cours de la saison 2016-2017, l'équipe première du Sporting Club de Bastia avait terminé dernière du championnat de Ligue 1 et avait été reléguée sportivement en Ligue 2. Elle avait ensuite fait l'objet d'une décision de rétrogradation en championnat de National 1 par une décision du 22 juin 2017 de la Commission de contrôle des clubs professionnels de la DNCG, confirmée le 12 juillet 2017 par la Commission d'appel de celle-ci. Le 4 août 2017, le Sporting Club de Bastia avait alors perdu son statut de club professionnel.

Cette perte du statut de club professionnel est prévue par l’article 102 du Règlement administratif de la LFP qui prévoit :

« Lorsqu’un club est relégué sportivement ou administrativement en Championnat National 1, il perd le statut professionnel [...]».

En principe donc, les clubs évoluant en National (championnat amateur relevant de la FFF) ne sont plus professionnels et ne relèvent plus du champ de compétence de la Ligue de Football Professionnel. Néanmoins, par exception, certains clubs sont autorisés par celle-ci à conserver leur statut professionnel (pour une saison, renouvelable une fois, cf. art. 102 du Règlement administratif de la LFP susmentionné). Ainsi, pour la saison 2021-2022, cinq clubs évoluant en National 1 bénéficient de ce statut à l’image de l’US Orléans ou encore du Red Star, autorisés par la LFP en raison des circonstances liées à la pandémie.

Lorsque cette autorisation est accordée, l’article 16 des Règlement généraux de la FFF autorise la LFP à donner ou retirer aux associations sportives affiliées relevant de son champ de compétence, l’autorisation de recourir à des joueurs professionnels.

Un club ayant été relégué sportivement en National peut donc être autorisé par la LFP à continuer de recourir à des joueurs professionnels. 

Cependant, cette règle ne vaut que pour les relégations sportives et exclut donc les rétrogradations administratives

En effet, l’article 234-2° des Règlements généraux de la FFF relatif à la rétrogradation d’un club faisant l’objet d’une procédure de sauvegarde ou de redressement prévoit :

« lorsque [la] rétrogradation a pour effet de reléguer un club à statut professionnel en Championnat National 1, National 2 ou National 3, elle entraîne automatiquement le retrait de l'autorisation d'utiliser des joueurs professionnels ».

Si les Girondins de Bordeaux sont rétrogradés en National 1, ils ne pourront donc pas bénéficier de l’autorisation de la LFP de recourir à des joueurs professionnels pour leur équipe.

Enfin si la situation du club devient manifestement insusceptible de redressement, le club risque enfin être placé en liquidation judiciaire.

L’article 234 des Règlements généraux de la FFF prévoit alors qu’en sus des mesures prévues en cas de sauvegarde ou de redressement, le prononcé d’un jugement de liquidation judiciaire entraine automatiquement la déchéance des droits sportifs du club. 
LFP - Ligue de football professionnel et décision de rétrogradation de la DNCG

Consulter l'ensemble des règlements de la LFP sur le site web de la Ligue de Football Professionnel

Les conséquences éventuelles de la décision rendue par le Tribunal de Commerce de Bordeaux

Le Tribunal de Commerce de Bordeaux a homologué ce mardi 19 juillet 2022, l’accord de conciliation conclu entre le club et ses créanciers King Street et Fortress. 

L’accord prévoit trois mesures phares :
  • Une augmentation de capital de 10 M€ par Jogo Bonito groupe, holding détenue par Gérard Lopez, propriétaire et président du club ;
  • Une mise sous séquestre de 14 M€ de garantie si ce montant n’est pas atteint en plus-value cet été ;
  • Une réduction de créance de 34,5 M€ consentie par King Street et Fortress. 

Ce plan doit néanmoins encore convaincre le conciliateur du CNOSF.

Enfin, si la proposition du CNOSF est de maintenir le club des Girondins en Ligue 2, cette proposition devra ensuite être soumise au Comité exécutif de la FFF, lequel pourra l'accepter ou s'y opposer.
Commission d'appel de la DNCG de la Fédération Française de Football - FFF

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