Enseignement contre rémunération : les cours sont-ils assujettis à la TVA ?

Scpa BERTRAND
26.12.16 12:23 Commentaire(s)
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Un arrêt du Conseil d'État du 11 avril 2014 nous permet compléter notre étude de l'ABéCéDaire concernant l'enseignement contre rémunération. Cet arrêt revient en effet sur l'assujettissement à la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) des cours donnés par le titulaire d'un Brevet d'État d'Éducateur Sportif (BEES).

Retour sur les faits

Le titulaire d'un BEES exerçait depuis 2000, en tant que travailleur indépendant, la profession libérale de moniteur d'escalade. A ce titre, et dans le cadre d'un contrat le liant à un Office Municipal des Sports (OMS), il dispensait des cours d'initiation dans des écoles primaires à raison de deux jours par semaine.

Suite à un contrôle, l'Administration fiscale décide d'assujettir à la TVA l'enseignant à raison des recettes tirées de son activité.

Contestant cette décision, il saisit la juridiction administrative. La Cour Administrative d'Appel de Versailles, dans son arrêt du 21 juillet 2011, fait droit à ses demandes en le déchargeant du rappel de TVA. Le Ministre chargé du budget s'est alors pourvu en cassation.

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Article 256 I du Code Général des Impôts (CGI)

Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel.

Article 256 A, alinéa 1er CGI (dans sa rédaction applicable au moment des faits)

Sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention.

Article 261 CGI

Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / 4 (...) 4° a. Les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées dans le cadre : / de l'enseignement primaire, secondaire et supérieur dispensé dans les établissements publics et les établissements privés (...) / b. Les cours ou leçons relevant de l'enseignement scolaire, universitaire, professionnel, artistique ou sportif, dispensés par des personnes physiques qui sont rémunérées directement par leurs élèves.

Des cours exonérés de TVA à certaines conditions

Le Conseil d'État rappelle tout d'abord les règles de droit applicables.

Article 13 i. et j. de la sixième directive du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires aux termes desquels les exonérations ainsi prévues portent sur "l'éducation de l'enfance ou de la jeunesse, l'enseignement scolaire ou universitaire, la formation ou le recyclage professionnel, ainsi que les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectués par des organismes de droit public de même objet ou par d'autres organismes reconnus comme ayant des fins comparables par l'État membre concerné" et sur "les leçons données, à titre personnel, par des enseignants et portant sur l'enseignement scolaire ou universitaire" .

Les juges en déduisent que l'exonération prévue à l'article 261 4 4°a. CGI "doit être regardée comme limitée à l'éventuelle rémunération des cours et leçons donnés dans les établissements scolaires ou universitaires qu'elles mentionnent et perçue par ces derniers".

Aussi, cette exonération ne peut s'étendre aux rémunérations qui peuvent être perçues par la personne physique qui a dispensé des cours et dont les droits à exonération sont exclusivement régis par les dispositions de l'article 261 4 4° b CGI.

Ainsi, après avoir constaté que le professeur exerçait à titre libéral son activité d'enseignement dans les écoles en vertu d'un contrat le liant à un OMS, pour le Conseil d'État, la Cour d'appel a commis une erreur de droit en jugeant "que la rémunération qu'il percevait à raison de cette prestation était exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée par application des dispositions" de l'article 261 4 4°a. du CGI.

Le ministre est donc fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. Le Conseil d'État renvoie l'affaire devant la Cour d'Appel de Versailles.

Scpa BERTRAND