Promesse d'embauche de sportifs : la volonté des parties comme critère déterminant retenue par la Cour de cassation

Scpa BERTRAND
30.10.17 13:39 Commentaire(s)
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La Chambre sociale de la Cour de cassation, par deux arrêts en date du 21 septembre 2017 (n°16-20103 et n°16-20104), a précisé les définitions respectives de l’offre et de la promesse unilatérale de contrat de travail de sportif entre un club sportif (rugby) et un joueur.
Cette distinction a ensuite été reprise par la Cour d'appel de Nîmes dans un arrêt du 10 octobre 2017 (n°16/00184) reconnaissant l'existence d'un contrat de travail du fait de la rencontre des volontés des parties.

Le droit des obligations appliqué au droit du travail entre un club et un joueur

Le nouvel article 1124 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 de réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations du 10 février 2016, dispose que :

"La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.

La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis.

Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en connaissait l'existence est nul."

Ces nouvelles dispositions appliquées au droit du travail et notamment à la promesse d'embauche permettent désormais au juge de valider la conclusion d'un contrat de travail suite à la signature d'une promesse d'embauche en cas de rencontre des volontés des parties.

Auparavant, les juges de la Cour de cassation jugeaient de façon constante que la promesse d’embauche précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction valait contrat de travail (Cass. Soc., 15 déc. 2010, n° 08-42951 - Cass. Soc., 13 mai 2003, n° 01-42729 Cass. Soc., 17 mars 2010, n° 07-44468 Cass. soc., 12 juin 2014, n° 13-14258 Cass. Soc.,  5 octobre 2017n° 15-14793). Cette solution ne s'attachait qu'au contenu de l'acte litigieux émanant de l'employeur et ne prenait pas en compte la manifestation du consentement du salarié.

Désormais, il appartient toujours aux juges de vérifier si la promesse comprend toutes les précisions relatives aux éléments essentiels du contrat de travail, mais ils doivent également apprécier la portée de l'acte en question afin de distinguer les offres des promesses de contrat de travail.

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L'application au sport de la nouvelle définition de la promesse d'embauche

Appliquées au domaine sportif, ces nouvelles dispositions législatives ont été retenues pour la première fois dans le cadre du litige opposant l'association de rugby Union Sportive Carcassonnaise à deux joueurs ayant bénéficié chacun d'une promesse d'embauche.

Dans un attendu de principe, la Cour de cassation, par deux arrêts du 21 septembre 2017 (n° 16-20103 et n° 16-20104), a précisé les définitions respectives de l’offre et de la promesse unilatérale de contrat de travail :

"Attendu que l’acte par lequel un employeur propose un engagement précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction et exprime la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation, constitue une offre de contrat de travail, qui peut être librement rétractée tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire ; que la rétractation de l’offre avant l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, l’issue d’un délai raisonnable, fait obstacle à la conclusion du contrat de travail et engage la responsabilité extra-contractuelle de son auteur.

Attendu, en revanche, que la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ; que la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat de travail promis."

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En conclusion, la reconnaissance d'un contrat de travail d'un joueur professionnel

Suite à ces arrêts, et toujours dans un dossier engageant l'Union Sportive Carcassonnaise, la Cour d'appel de Nîmes, par un arrêt du 10 octobre 2017 (16/00184), prononcé sur renvoi (Cass. Soc. 25 nov. 2015, 14-164324), a repris les attendus énoncés par la Cour de cassation. Elle se réfère expressément à "l'évolution du droit des obligations résultant de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 conduit à apprécier différemment, dans les relations de travail, la portée des offres et promesses de contrat de travail". Elle conclut, sur le cas d'espèce, que "l'acte litigieux caractérisant la rencontre des volontés des parties et la formation parfaite d'un contrat de travail, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions". La Cour d'appel apprécie donc la rencontre des volontés des parties au même titre que la présence des éléments essentiels du contrat de travail dans le contenu de l'acte.

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La Cour de cassation en prenant acte des nouvelles dispositions législatives issues de la réforme du droit des obligations permet désormais la reconnaissance de la rencontre des volontés des parties comme critère de distinction entre la simple offre de travail et la véritable promesse d'embauche (outre les éléments essentiels du contrat de travail devant toujours figurer dans la promesse d'embauche si son bénéficiaire souhaite la requalifier en contrat de travail).

Scpa BERTRAND