Sportif professionnel : la clause de rupture anticipée d'un CDD est interdite

Scpa BERTRAND
18.11.16 22:58 Commentaire(s)
Rupture abusive du contrat de travail du sportif - avocat

La Cour de cassation vient de rappeler, dans un arrêt du 4 février 2015 (Gunn c/ Poitiers Basket 86, n°13-26.172), l'interdiction des clauses résolutoires dans les contrats de travail à durée déterminée des sportifs professionnels.

Avenant contenant  une clause de rupture anticipée, dite clause résolutoire, dans un contrat de travail (CDD) de basketteur professionnel

En 2009, le club de basket de Poitiers recrute un joueur américain pour une durée d’une saison sportive. Ce contrat est, par la suite, prolongé de deux nouvelles années.

Dans un avenant signé le 1er septembre 2010, les parties conviennent qu'en "cas d'absences répétées et injustifiées du joueur lors d'entraînement, réunions, opérations de relations publiques, voire matchs (plus de trois absences injustifiées), les deux parties s'accordent sur une possibilité d'annulation de la deuxième saison au contrat, par envoi d'un courrier simple, avant le 30 avril 2011. De même, le joueur a la faculté de choisir d'interrompre le contrat à la fin de la première saison, par l'envoi d'un courrier simple avant le 30 avril 2011".

Le 28 avril 2011, le club de Poitiers fait application de cette clause et informe son salarié qu’il met fin à leur relation contractuelle.

Le joueur saisit alors la juridiction prud'homale pour faire constater la rupture de son contrat à l’initiative de son employeur.

Se défendre contre une rupture du contrat de travail du sportif professionnel - Cabinet BERTRAND Avocats Droit du Sport

Rupture anticipée du contrat de travail du joueur par le club employeur

Par un jugement du 30 mars 2012, le Conseil de prud’hommes de Poitiers considère que la rupture anticipée du CDD est imputable au Club.

Les juges condamnent alors le Club à verser au joueur les sommes de 84.000 € à titre de dommages et intérêts et 267 € à titre de rappel de salaire. Le club interjette appel de ce jugement.

Dans un arrêt du 11 septembre 2013, la Cour d’appel de Poitiers infirme le jugement déféré (sauf en ce qui concerne le rappel de salaire).

Elle retient, en effet, que la rupture du contrat par l’employeur est régulière et déboute dès lors le salarié de l’ensemble de ses demandes.

Les juges précisent en effet que l’avenant du 1er septembre 2010 "constitue un accord amiable conformément à l’article L. 1243-1 du Code du travail, puisqu'il offre la faculté à chacune des deux partie, le salarié et l'employeur, de mettre fin au contrat de travail avant son terme en fixant des conditions particulières pour l'employeur".

Le fait que pèsent sur le seul employeur des conditions restrictives de mise en œuvre de cette faculté "ne caractérise pas une clause résolutoire prohibée permettant à celui-ci seulement de rompre le contrat par anticipation avant l’échéance du terme, puisque la faculté est également ouverte au salarié, et ce sans motifs".

Le joueur se pourvoit alors en cassation.

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L'interdiction des clauses résolutoires dans un CDD de sportif professionnel

La Cour de cassation rappelle tout d'abord qu'aux termes de l'article L.1243-1 du Code du travail, "sauf accord des parties, le contrat à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail et qu'il résulte de ces  que le salarié ne peut par avance accepter la rupture du contrat par l'employeur pour d'autres causes que celles prévues par ce texte".

En considérant que l'avenant "constitue un accord amiable conformément à l'article L. 1243-1 du code du travail ", et alors que la Cour d'appel "avait constaté que la clause résolutoire stipulée à l'avenant permettait à l'employeur de rompre le contrat pour d'autres causes que celles prévues limitativement par l'article L. 1243-1 du code du travail", la Cour de cassation considère que la Cour d'appel de Poitiers a violé l'article précité du Code du travail.

L'arrêt est donc cassé mais seulement en ce qu'il dit que la rupture du CDD par l'employeur est régulière et qu'il déboute le joueur de sa demande de dommages-intérêts.

Les parties sont renvoyées devant la Cour d'appel de Bordeaux.

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Scpa BERTRAND